Il est de ces moments où le destin vous frappe, il vous donne une giffle qui marque profondément. Alors que nous mettions la touche finale au Spécial de Red Universe, focalisés sur deadlines et montages, la nouvelle des assassinats de Charlie Hebdo est passée à coté. Mais aujourd’hui, la violence me rattrapa.
1978 Récré A2 prend l’antenne et, agé d’à peine 5 ans, je commençais déjà à absorber tout ce qu’un enfant de mon âge pouvait découvrir dans les dessins animés de tous horizons. Cela me marquera à jamais, faisant de moi ce que je deviendrais, beaucoup plus tard. Quel rapport ? Dans l’équipe de Récre A2, au milieu de toute une tribus d’animateurs jeunes et gauchistes pour certains (à l’époque), un dessinateur faisait des caricatures en direct. C’était étonnant, il dessinait sur une table lumineuse des dorothées au nez si pointu qu’elle coupait le papier. Ce monsieur à la coupe de cheveux type « méduse » semblait empli d’une modestie et d’une générosité sans limite. Cabu me montra alors que le dessin était l’expression universelle. Sans parler, il transcendait les univers des hommes et pouvait toucher, attendrir, blesser ou enjôler.
Quelle puissance que celle d’un chansonnier qui parlerait d’un coup toutes les langues.
Je n’irais pas jusqu’à dire que Red Universe existe grâce à lui, mais ce que je crois et que j’essaye de distiller autant que possible au travers de cette grande fresque qu’est RedU, il en est une des origines.
Je suis Musulman.
Pas de conviction, mon opinion des religions est toute pragmatique : Dieu n’a que faire des hommes… je me suis converti d’abord par amour Pour une femme. Mais pour une fois, je peux mettre cela en avant et prononcer les mots suivants sans être taxé d’islamophobie native. Aux assassins de tous poils qui tuent au nom de ce qu’ils ignorent, à ces ignares qui multiplient les prières, pensant remplir un acte de foi alors qu’il s’agit visiblement d’un sacrilège, à ces bêtes repoussant l’Humanité bien au-delà des premiers dessins de Lascaux, je ne vous souhaite qu’une chose : que ce Dieu, que vous avez couvert de sang, existe vraiment. Qu’une fois morts, vous puissiez rencontrer le Prophète, et qu’il vous dise combien vous l’avez déçu et humilié. Il livrait la guerre aux Rois et aux armées, il ne massacrait pas les innocents, et.. hô incroyable, il acceptait de parler avec les esprits critiques. Oui c’était un grand homme, aussi grand que vous êtes bas, aussi élevé que vous êtes enfoncés, aussi admirable que vous êtes détestables.
Mais le mal est fait, et les morts n’en ont plus grand chose à faire des mots des vivants.
Pour eux, pour leur offrir un hommage postume aussi modeste que marqué, ce ne sera pas un dessin, non, ce sera une musique. J’ai retrouvé, suite au message d’un auditeur, ce morceau, tiré d’une série ayant largement inspiré Red universe : Battlestar Galactica (2003).
La chanson s’appelle « Wander my friends » de Bear McCreary, dans la saison 1. Ici la voici jouée lors d’un concert dédié à la série. C’est le thème du Commandant Bill Adama.
Vous ne me connaissiez pas, mais vous étiez des amis, et aujourd’hui, maintenant, je vous pleure.
Adieu.
Raoulito
Écrite en Gaélique, je vous l’ai retranscrit ci-dessous
Siúlaigí a chairde, siúlaidh liom
Mar cheo an tsléibhe uaine ag
Imeacht go deo
D’ainneoin ár dtuirse leanfam an tslí
Thar chnoic is thar ghleannta
Go deireadh na scríbi
Seo libh a chairde is canaidh liom
Líonaigí’n oíche le greann is le spórt
Seo sláinte na gcarad atá imithe uainn
Mar cheo an tsléibhe uaine,
Iad imithe go deo
(Français)
Promenez-vous mes amis, promenez-vous avec moi
Comme le brouillard sur la montagne verte, se déplaçant éternellement
Malgré notre fatigue
Nous suivrons la route
Par monts et vallées
Pour la fin du voyage
Allez mes amis et chantez avec moi
Remplissez la nuit avec la joie et le sport
Voici un toast aux amis qui sont partis
Comme la brume de la montagne verte,
Disparus à jamais.