Nouveau Livre de Red universe disponible en ligne : le Chapitre 7 « L’agent douze » accompagné de ses illustrations et commentaires !
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À très bientôt donc, et bonne lecture :-)
Le Contre-amiral Poféus se leva enfin du fauteuil de son bureau au ministère de la sécurité. C’était l’heure de son rendez-vous avec Calande, et il surveillait avec appréhension le défilement des chiffres sur l’horloge murale, depuis déjà plusieurs heures. Elle devait s’être maintenant installée dans le petit salon et, peut-être, avait commandé son thé au jasmin ? Il avait donné des ordres aux cuisines pour en préparer un toutes les dix minutes à l’approche des horaires de ses rendez-vous. C’était un accroc à la sécurité, la présence de la psychologue était censée rester secrète, mais il voulait tellement qu’elle se sente à l’aise. Le feu dans la cheminée, la propreté du salon, la semi pénombre des rideaux, tout était passé par ses circulaires.
Leurs rendez-vous devaient être parfaits, point. Et celui-ci tout particulièrement…
Il ouvrit la porte du petit salon avec une appréhension de jeune premier, mais fut déçu de n’y découvrir personne. Calande avait du retard, c’était rare chez elle ; il traversa la pièce puis vint réchauffer ses mains au foyer brulant, n’ayant d’autre idée que d’attendre l’arrivée de sa praticienne. L’hiver approchait et la température générale diminuait ; ces grands bâtiments rénovés étaient parfaitement isolés et leurs climatisations sans faille, mais la chaleur de l’âtre, naturelle, primaire, comblait désormais un besoin bien plus complexe chez Poféus.
Une poignée de secondes plus tard, la clanche de la porte tourna enfin sur elle-même, révélant Calande Rorré, emmitouflée dans une épaisse gabardine. À peine avait-elle accroché son vêtement au portemanteau qu’elle éternua, dans un bruissement aigu.
Poféus sursauta… Calande était malade ? Mais que pouvait-il faire pour l’aider ?
« Angilbe, je suis navré du retard. Je… j’ai attrapé un petit froid hier soir, mon réveil n’a pas sonné, les embouteillages… excusez-moi. »
Elle s’approcha à son tour du foyer et donc de lui par la même occasion. Son parfum l’enlaçait à nouveau, pénétrant au-delà de ses narines et capturant son âme aussi surement qu’un filet ; il nota que rares avaient été les moments où leur proximité avait été aussi grande.
« Ce n’est rien Calande. Vous auriez pu… décommander ? Je m’en voudrais que vous aggraviez votre froid à cause de moi. Et puis…
Oui ?
…je vous aurais fait porter quelque chose à votre cabinet, je ne sais pas… un thé au jasmin ? »
La jeune femme pouffa, d’un de ces petits rires féminins où l’on sent la personne touchée par une tendresse inattendue.
« Écoutez, j’accepterais volontiers un de ces merveilleux thés bien chaud, justement. Mais…, ajouta-t-elle d’un air coquin, si j’avais su pouvoir en profiter tout en restant chez moi, je ne serais pas venu ! »
Et une nouvelle magie s’opéra chez le contre-amiral, quelque chose qui relevait plus de l’évènement cosmique que d’une humeur naturelle ; il sentit ses muscles zygomatiques se contracter, une bouffée monter en lui en une forte inspiration et se contracter un temps avant de…
« Ha, ha, ha, ha … Mmmhm… je… pardon, excusez-moi, mais… Ha, ha.. C’est, c’était très drôle.
Oui ? Vous m’en voyez… hé, hé, ravie, ha haaa… »
Le serveur entra à ce moment et pu assister à, sans aucun doute, une scène qu’il devra garder secrète sous réserve de paraitre affabuler sur son redouté supérieur. Le contre-amiral riait sincèrement avec une de ses invités, au point qu’ils semblaient tous deux ne même pas s’être rendu compte de sa présence. Lorsque le ministre de la sécurité l’aperçu enfin, celui-ci se recomposa immédiatement un visage pour demander qu’on leur laisse tout sur la table. Le domestique aurait pu penser avoir rêvé la scène précédente, s’il n’avait pas ajouté un…
« …Merci bien. »
Une fois la porte refermée, Angilbe fit un geste à son invité, lui intimant d’attendre près de la cheminée. Il s’approcha de la théière et, méticuleusement, rempli une tasse en y ajoutant un sucre unique. Puis, la cuillère tournant lentement pour en diluer la douceur, il apporta le breuvage près de l’âtre.
« Angilbe ! Mais ne vous donnez pas toute cette peine… Je ne sais que dire ?
Alors je vous propose, Calande, de faire comme toujours : laissez-moi parler. »
La jeune brune resta sans voix un instant, les yeux interrogateurs, puis porta la tasse à ses lèvres et but une première gorgée. Tous deux savaient que cela signalait habituellement le début de la séance proprement dite, même si celle-ci devrait se dérouler debout, devant le foyer aux braises vives.
« Tout d’abord, je voudrais vous remercier. Vous avez… nous avons fait un travail absolument remarquable et il m’est difficile d’en ignorer les résultats. Quelque chose en moi a tout d’abord été… remué je dirais, puis des fissures l’ont lézardé et il a commencé à fondre, un peu comme si c’était mon âme que nous avions porté devant ce feu de cheminée.
Mes sautes de réalité ont diminué, ce qui me permet d’être plus actif et pertinent dans mes activités journalières. En cela aussi, je vous dois beaucoup.
Elles n’ont pas cessés, n’est-ce pas ?
Non. Mais je ne vous apprend rien.
Que voulez-vous dire ? »
Elle venait de poser un peu trop vivement sa soucoupe sur le linteau et, sans vraiment qu’elle s’en aperçoive, sa respiration s’était accélérée. Poféus remarquait, maintenant, des choses qui lui échappaient auparavant ; c’était incroyable combien quelques difficiles souvenirs refoulés pouvaient vous transformer une personne.
Suivant la suite de son programme, il préféra ne pas penser à ce qu’il faisait et, délicatement, se saisit d’une des mains de sa vis à vis.
« Calande. Je sais et je l’accepte… »
L’autre ne bougea pas. Ses yeux immobiles semblaient hypnotisés par ceux de l’homme mûr face à elle.
Alors Calande, quand la souris devient le chat, en quoi se transforme l’ancien prédateur ?
pensa-t-il, en adressant à la belle ce qu’il réussissait de mieux en matière de sourire.
« … je ne vous en veux absolument pas, bien au contraire. Vous avez fait preuve de compassion, ainsi que de professionnalisme, en poursuivant ce but de m’aider à… m’ouvrir à moi-même. Même si cela impliquait de me cacher un aussi lourd secret.
De… depuis quand le savez-vous ? demanda-t-elle, de l’angoisse à peine dissimulée dans la voix.
Vous êtes intelligente, vous deviez vous douter que je ne laisserais pas des analyses de ce genre dire des choses sur moi que j’ignorerais. Je l’ai su très vite et très discrètement, j’en ai les moyens.
…alors, vous… Non, Angilbe, je veux vous l’entendre dire. Peut-être ne parlons-nous pas de la même chose ? »
Sans hésiter, laissant toujours parler son instinct plus que son esprit d’analyse, Angilbe se rapprocha encore de sa psychologue, soulevant la main de la jeune femme, tel un dernier rempart entre leurs deux visages.
« Je vais mourir.
Ce qui m’empêche d’être entendu par les mentaux, les suites de cet accident arrivé loin d’ici, il y a longtemps, me tue à petit feu. Et mon espérance de vie n’est que de quelques semaines, au mieux quelques mois.
C’était cela l’origine physiologique de mes absences. »
Il embrassa lentement, un à un, le dessus des doigts offerts, puis poursuivit, devant l’absence de réaction, l’acceptation peut-être, de la jeune femme.
« Mais vous aviez remarqué une autre chose derrière la machine que j’étais lors de notre première rencontre. Et vous avez creusé, vous m’avez poussé à faire ressortir l’homme enfoui sous les innombrables secrets de mon existence. Cette fêlure profonde, cette lourde omission qui me hantait, nous l’avons extrait de son obscurité ensemble ; c’est grâce à l’épaule que vous m’avez offerte, grâce à votre dépassement des aprioris et de ce que vous appeliez les lois de la société, que nous avons pu obtenir ce résultat.
Cette maladie, aviez-vous prévu de me l’annoncer aujourd’hui ? »
La jeune femme au maintien si stricte, si sure d’elle d’habitude, se contenta d’une moue suivie d’un hochement de tête, rappelant une petite fille prise en faute. Mais elle n’était plus une enfant et cette façade ne saurait la protéger de la suite.
« Bien… maintenant, je vais repousser ces lois encore un peu plus loin, et faire quelque chose que je n’aurais même pas imaginé il n’y a pas si longtemps…
…vous pouvez refuser. »
Angilbe approcha son visage de celui de Calande, et, délicatement, lui déposa un baiser sur ses douces lèvres. Elles étaient chaudes, tendres… et accueillante.
…
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- Prod: PodShows
- Réa: Raoulito
- Relecture: Arthur, Kwaam, ClaXus
- narration: Anna
- Acteurs: Pofeus: Pof, Calande: Coupie
- Derush : Zizooo
- Compo: Ian, Cleptoporte
- Montage: Raoulito