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La plus grande saga intergalactique jamais racontée en podcast

raoulito

Des réfugiés vont découvrir les secrets enfouis sous des années d’oublis et de honte. Confrontés à des choix et des conflits sur leur modèle de société, ils avanceront vers leur but ultime, là où se concentrent leurs espoirs : la planète rouge. Chapitres entiers http://reduniverse-chapitres.podcloud.fr Chapitres spéciaux http://reduniverse-speciaux.podcloud.fr Et pour plus d’immersion, les livres illustrés http://reduniverse.fr/livres-numeriques/

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RedU T1 Ch26 Ep12

Red Universe Tome 1 Chapitre 26 Épisode 12 : " Révolution "

Du hublot de la navette de transport, Xopilat’l regardait s’éloigner lentement la planète naine d’où il venait de décoller avec une section de mineurs. De son illustre nom « Cuitliē », celle-ci abritait la majeure partie des habitants de cette région nommée « Chilico » ; c’était une zone stratégique car productrice de la fameuse « pierre qui chante », ce minerai sensible aux émissions psychiques qui représentait le cœur de la technologie nalcoēhuale.
Cela faisait pas mal de cycles qu’il n’avait plus été autorisé (il ne l’avait pas demandé non plus, avouons-le) à quitter ce bout de roche perdu au milieu du système d’anneaux formant Chilico. Ses obligations officielles d’agent des mines comportaient d’abord une lourde part administrative, loin des contraintes physiques de son ancienne vie de mineur, mais cela lui offrait peu de temps libre. Autrefois très impliqué dans l’action syndicale, le pouvoir en place sur Ti’ltchiti avait profité de son grave accident pour le rapatrier sur Cuitliē, sous les yeux et les oreilles de la police politique, où il se tenait désormais tranquille.
Il maugréa un peu trop fort, ce qui intrigua quelques secondes ses voisins avant qu’ils ne s’en désintéressent.
La vie des mineurs de Chilico n’était pas de tout repos. À creuser les astéroïdes proches du trou noir central on risquait, au mieux, de perdre un bras et l’extrémité de ses antennes comme Xopilat’l, au pire, de ne jamais revenir.
La République nalcoēhuale avait colonisé cette région sous le prétexte fallacieux que tous les Nalcoēhuals étaient frères, mais c’était bien évidemment pour sécuriser l’approvisionnement en « pierre qui chante », vital pour l’industrie militaire. Les habitants ancestraux, issus de la vague originale des pionniers, n’avaient pas accepté cet état de fait et s’étaient révoltés par deux fois... insurrections noyées dans le sang par de terribles répressions.
« Et dire que cela se prétendait une « république », pensa Xopilat’l, la main sur le petit amplificateur-crypteur psychique à sa ceinture. Qu’ils commencent par lever la suspension des droits des citoyens et la loi martiale en place depuis près d’un cycle ! »
Car, loin de n’être qu’un activiste rangé, l’ancien mineur était en fait le président élu de la République cachée de Chilico, celui que tous les services de Ti’ltchiti recherchaient assidument sans y parvenir. Utilisant les derniers moyens de cryptage physiques et psychiques, multipliant les zones de réunions et filtrant les arrivées, la république cachée de Chilico avait réussi l’exploit de s’étendre dans un environnement dominé par la police de la pensée. Ses partisans apprenaient à échapper aux contrôles psychiques, à concentrer toutes les informations, quelle qu’en soit l’importance, et à les transmettre à la présidence.

La navette ralentit puis pivota pour apponter au sas prévu. C’était la dernière arrivée avant que le cargo de transport ne quitte son orbite pour le centre du système de Chilico. Apparemment, on les destinait à la quatrième ceinture, où un gisement prometteur avait été découvert à la suite de deux grosses collisions d’astéroïdes. Ce cauchemar ultime du mineur représentait également le salut de la production...
« ... tout du moins pour ceux de Ti’ltchiti », chuchota-t-il pour lui-même au milieu de ses congénères qui s’ébrouaient dans le sas.
Le voyage durerait cinq déciles avec un seul saut de Transition et c’était justement la principale raison de la présence de Xopilat’l ici. Car les services de sécurité ne prenaient pas garde aux transports de moins d’une douzaine de déciles et le saut entre les dimensions permettait d’échapper à un quelconque traçage. Sur un signe de tête, quelques compagnons formèrent une haie de solides gaillards autour d’un coin de mur où il put placer sur son front la barrette liée à l’appareil psychique de sa ceinture. Dès l’activation du protocole de protection, son esprit se matérialisa dans le Colisée, un immense lieu de réunion virtuel où les rebelles de la résistance pouvaient organiser de grandes rencontres comme celle-ci.
À sa droite patientait Telma’k, son fidèle ami qui tenait le rôle de premier secrétaire. S’il n’éprouvait pas le même genre de foi en l’avenir que Xopilat’l, il demeurait un coordinateur de génie adepte du secret ce qui, vu la situation de la république cachée de Chilico, représentait un sérieux avantage. Ses yeux viraient à l’orange et son teint bleu ciel parlait pour lui de l’état de fatigue, voire de stress dans lequel il baignait en l’attente de ce jour, car il n’était pas dupe.
Alors c’est pour aujourd’hui, Président ? chuchota-t-il le dos tourné à l’assemblée qui patientait. Xopilat’l lui sourit en tapotant doucement l’épaule de son ami.
Oui, nous attendions cela depuis si longtemps. Aie confiance, comme moi j’ai confiance...
Il s’approcha ensuite du bord de l’estrade. Écartant les bras en un geste apaisant, il demanda aux spectateurs un moment de calme, ce qui était quasiment inutile. La rumeur avait couru et tous savaient que quelque chose d’important allait être annoncé aujourd’hui.
Le président observa quelques secondes l’assemblée face à lui. Combien y avait-il d’informateurs de la police, de traitres voire d’agents infiltrés dans cette foule ? Par définition, une minorité et certains étaient déjà fichés par ses camarades chargés du renseignement. À ce jeu du Zlabot et de la croasouris, Xopilat’l pouvait compter sur un avantage intrinsèque au mouvement de résistance de Chilico : les anciennes familles se connaissaient toutes et chaque membre y avait sa place. D’où la difficulté pour la police de Ti’ltchiti de les infiltrer.
Il décida de mettre fin au suspense :
« Mes amis, mes voisins, mes concitoyens ! Vous avez sans doute suivi comme moi les changements intervenus à la tête de l’oppresseur de Ti’ltchiti. Désormais, il ne se voile plus derrière une façade démocratique, il s’est officiellement et durablement transformé en dictature. Au moins, nous lui reconnaissons une clarification des choses, même si nous lui connaissions déjà cette face depuis bien trop longtemps.
Mais ce n’est pas tout. Nos sources, précises, se recoupent sans possibilités d’erreur : l’armée noire qui nous oppresse retire ses forces de tous les territoires, dont le nôtre. Ils partent se regrouper à l’opposé du Cercle-de-Khabit dans une folle tentative pour contrer un quelconque ennemi qui la terroriserait. Est-ce l’Empereur-Dieu de Ragnvald ? Sont-ce de nouveaux humains ou encore quelque chose d’autre ? Dans tous les cas, mes amis, je vous le dis sans ambages : nous saurons profiter de la situation pour en tirer avantage.
Je parle bien sûr de négociations, de discussions en haut lieu avec des membres influents de la politique nalcoēhuale. Ceux de Ti’ltchiti sont en état de faiblesse, je suis persuadé qu’ils nous offriront enfin une oreille attentive. Et dans le cas, possible, où nous aurions besoin de montrer notre union, vous serez appelé pour que nous levions tous ensemble notre poing.
Ce sera tout pour l’instant, je vous tiendrai informé de l’évolution de la situation. Soyez prêt, l’œil bien ouvert et attendez : le dénouement est peut-être proche !
Longue vie, et prospérité. »
Et toute la foule répondit, croisant bras contre torse :
« Longue vie et prospérité ! »
« Longue vie et prospérité ! »
S’en suivit une longue ovation où la ferveur se teintait de l’espoir irréel d’une liberté retrouvée. Avant qu’il ne se déconnecte du Colisée, Telma’k le prit à part :
Tu es certain qu’ils auront compris le message ?
Bien sûr. Il n’y aura que les agents infiltrés pour chercher d’hypothétiques politiciens négociant avec nous. Nos partisans ne s’y tromperont pas.
L’autre baissa les épaules, presque résigné :
Donc on attaque ? Et tu veux vraiment commencer par la raffinerie de « pierre qui chante » ? C’est un endroit bien gardé...
Xopilat’l plissa les paupières le regard soudain sombre : il allait devenir chef de guerre et de ses victoires, ou de ses échecs, dépendrait l’avenir de son peuple :
« Plus que jamais. »


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RedU T1 Ch26 Ep11

Red Universe Tome 1 Chapitre 26 Épisode 11 : " La guerre des Stuffies (3)"

Tous ne purent entrer, mais rapidement l’atmosphère devint lourde de respirations, de transpiration ou de la simple élévation mécanique de la température. De son imposant fauteuil, le Stuffy mutualiste se leva et une haie s’ouvrit jusqu’à son alter ego. Lentement, il descendit quelques marches et s’approcha en boitant, abandonnant la distorsion de sa voix en détachant la prothèse collée à sa gorge :
Comme tu vois, j’ai aussi du mal. Mes pilules protègent un peu, mais ne font pas de miracles : une chimère usée est une chimère usée.
Je te rappelle que tu m’as donné ta parole que je contacterais mes hommes pour repartir, lâcha Stuffy ministère qui n’appréciait pas du tout cette meute d’agents mutualistes bloquant tous les accès.
Oui, oui... répondit énigmatiquement l’autre en s’approchant. Donc QuartMac par exemple, celui qui nous prête ses traits. As-tu cru sérieusement qu’il ignorait ce que deviendraient ses chimères non matures ? Ce... ce type les fabrique depuis des années et des années, il était censé être mort alors que Fabio et Ralato n’étaient que des adolescents ! Il maitrise la technologie du clonage et tous ses obstacles, il ne pouvait méconnaitre le risque que l’on prenait.
Mais je lui en sais gré. Car cela nous a ouvert les yeux, à moi et à l’autre.
Quel autre ? demanda doucement Stuffy ministère, comme s’il essayait de repousser ce qui apparaissait déjà comme une évidence.
Le Stuffy Souriant, bien entendu. Il m’a contacté alors que les premières certitudes s’imposaient à moi (comme à lui). Nous avons convenu qu’il était indispensable de poursuivre ce qui avait été entamé, mais cette fois en nous unissant, Souriants et Mutualistes. Les conglomérats de Talbot ont participé à la mise à mort de la bête en rapatriant d’urgence leurs fonds de partout, à la seconde même où se produisaient les explosions.
Tu entrevois maintenant le chronométrage de toute l’opération ?
Il le saisissait en effet : aux Souriants l’élimination de Ralato, aux Mutualistes celle de Stuffy ministère, tandis que l’attentat géant mettait à genoux la société humaine toute entière. Les Forces mentales désorganisées, il ne restait que l’armée qui ne saurait où donner de la tête. Résistant à l’envie de prévenir Ralato coute que coute, il contre-argumenta à l’autre Stuffy :
Même si Ralato et moi disparaissons, Poféus tient toujours très bien les rênes. Et il n’est pas du genre compréhensif.
Le président de l’assemblée, le parlementaire Wolf occupera l’intérim selon la constitution, tandis que Poféus tombera pour incapacité. Ce ne sera pas difficile... il est complètement fou depuis la mort de son amie la psychologue, les témoignages ne manquent pas. Wolf est un opportuniste, il se rangera avec nous le temps qu’on affirme notre emprise, on l’éliminera ensuite.
Les transmetteurs ne fonctionnent pas dans cette base, tout signal est coupé et nous nous sommes assurés que plus personne ne se trouvait à portée de ton pouvoir mental...
... donc tu vas mourir. Tu le sais, je pense, non ?
Stuffy ministère ne répondit pas. Toute cette mise en scène n’avait aucun sens, sauf à cacher autre chose :
J’ai toujours été faible de cœur, pour les nanas comme pour les mecs. Si tu avais voulu ma disparition, tu aurais pu être bien plus efficace. Qu’est ce que tu cherches, vraiment ? Et pourquoi tous ces Mutualistes doivent-ils y assister ?
Ha, ça... murmura Stuffy mutualiste. Il franchit le peu de distance restant jusqu’au Stuffy ministère.
Dans un curieux sourire, il écarta les bras devant lui, le visage levé au plafond en une soudaine expression de quasi-béatitude. Un grand gaillard en tenue sombre s’approcha de lui par-derrière et d’un mouvement sec, lui trancha la gorge ! Le rictus ne quittait pas la figure radieuse de ce QuartMac-Stuffy, alors que son corps s’affaissait sur le sol tel un vieux chiffon.
Le Stuffy ministère, dernier « Stuffy » de cette base et de cette planète, couvert de sang, resta sans voix. Il mit plusieurs secondes à détacher ses yeux de la vision morbide pour contempler l’assassin à la dague ruisselante encore levée. Leurs deux regards se croisèrent quelques secondes, puis l’autre lui adressa un sourire. L’Agent mental comprit enfin :
Tu t’es dupliqué en Mutualistes, tu as volé l’esprit de chacun d’entre eux !
Exact, répondit une femme derrière lui. Ils étaient ce qu’on appelait la « source », les esprits originaux que l’on dupliquait à volonté et qui restaient bien cachés dans les bases secrètes de l’organisation.
Lui, ajouta-t-elle en désignant du menton le corps gisant, n’était qu’une enveloppe condamnée.
Cela m’a pris du temps, poursuivit un Tropicalien qui sortait de la foule. Car toutes les notes de QuartMac ou de Heir n’expliquaient pas s’il était possible d’effacer une psyché vivante pour en imposer une nouvelle, sauf que...
Stuffy ministère compléta, coupant la parole à l’aberration des clones de son double :
Sauf que nous avons partagé l’esprit de Ralato pendant des mois et que cela nous a aidés à comprendre bien des choses.
À force d’expériences, en effet, confirma la première femme. Une fois la méthode au point, cela n’a été qu’une question de temps. Regarde donc ! Une armée de Stuffy, nous à l’infini ! Je l’ai fait !
Je vois ça, rétorqua l’autre. Et tu as fait venir tout le monde pour assister à ma mise à mort ? C’est quoi ? Une sorte de rituel pour faire plaisir à tes clones ?
En réponse, les Mutualistes présents sortirent une dague et la pointèrent vers Stuffy dans un geste, non pas menaçant, mais qui se voulait inéluctable. Plusieurs parlèrent en même temps :
« Nous désirons tous être là pour te voir mourir. »
Et quarante couteaux s’abattirent sur l’Agent mental changé en chimère bien malgré lui. La mise à mort dura de très longues minutes, le temps que chaque Mutualiste ait pu déchirer un morceau de la chair de leur ancien frère. L’une après l’autre, les lames aiguisées s’enfoncèrent dans la masse sanguinolente qu’était devenu le tronc de Stuffy. Il s’effondra au sol, sur la dépouille de son double mutualiste, et ce fut dans son dos ou dans ses côtes que la majorité des coups plurent.
Lorsque le dernier Mutualiste, le Tropicalien, vint planter sa propre arme dans l’amoncèlement de chair, il constata la mort de la chimère. Un rapide balayage mental le lui confirma, mais il y eut autre chose : une sorte de point luisant dans l’esprit s’éteignant, une sensation très subtile que l’excitation de l’assassinat des deux Stuffy avait occultée. Tous partagèrent cette étrange sensation et levèrent la tête. Une borne, un amplificateur psychique, avait été installé à l’insu de tous au sommet de la colline, sous laquelle se trouvait la mine, et elle était connectée d’une manière ou d’une autre avec le Stuffy ministère. Alors qu’ils s’inquiétaient, la brillance disparut et l’engin se tut.

À cent-vingt-mille kilomètres d’altitude, quatre croiseurs de la flotte spatiale étaient en orbite stationnaire. Lorsque le Stuffy des Forces mentales mourut, le petit appareil suivit sa programmation et émit l’impulsion attendue par l’escadre.
Les canons patientaient, leurs ogives pointées sur l’objectif et les ordres étaient clairs.
Un déchainement de fureur s’abattit alors sur la mine, la colline, le lac, la région, réduisant plusieurs villages, des routes, la forêt et même quelques maisons des faubourgs lointains de MaterOne-Centrum, en un amalgame déconnecté de millions d’atomes. L’erreur du Stuffy mutualiste avait été de se croire suffisamment protégé, face à son frère du ministère, pour venir le tuer en personne. Il avait sous-estimé le choc et le sentiment de trahison qu’il avait déclenchés chez celui qui restait, jusqu’à preuve du contraire, le seul Stuffy équilibré de cette partie de l’univers.
Les flammes brulèrent bien plus profondément que les seules fondations de la colline, le sillon arraché à la terre mettrait des siècles à cicatriser de l’impact cumulé de ces frappes orbitales.

Le vrai dernier Stuffy n’avait jamais souhaité se cloner et il avait personnellement vidangé les cuves de ses chimères de remplacement en maturation. Lui aussi pouvait estimer qu’une cause valait des sacrifices et, surtout, n’avait cultivé que peu d’espoir sur l’issue d’une hypothétique confrontation avec son double mutualiste.
Peut-être était-ce les douleurs, sans doute le carnage provoqué par son frère d’esprit, toujours est-il qu’il ne s’estimait plus en droit de vivre comme un fantôme.


SOUTENEZ REDUNIVERSE ! - Prod: podshows, Réa: Raoulito, Relecture: JMJ, iGerard, Acteurs : Rafa96: narration, Leto75/Drwolf: Stuffies, FallenSwallow: femme mutualiste, Lorendil: tropicalien mutualiste Derush/montage: Gvillaume/Ackim, Musiques: VG, Ian, Cleptoporte

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RedU T1 Ch26 Ep10

Red Universe Tome 1 Chapitre 26 Épisode 10 : " La guerre des Stuffies (2)"
(EDIT: 20/07/2018, mauvais fichier, on est désolé!)

Rapidement, le décor changea. Des abords typiques d’une vieille mine désaffectée avec ses poutres vermoulues et ses toiles d’araignées, le Stuffy du ministère pénétra un corridor impeccable à la lumière bleue diffuse, truffé de capteurs et autres caméras.
« Arrête-toi quelques secondes », lui intima son hôte dans un message psychique.
Plusieurs carreaux autour de lui se mirent alors à rougeoyer du sol au plafond, tout y passa jusqu’à ce que le couloir redevienne normal. Un panneau sur le côté s’enfonça et glissa en révélant une seconde galerie.
« Rejoins-moi, maintenant » précisa simplement la voix.
Le mur reprit sa place, Stuffy apprécia l’idée d’un œil connaisseur : si des agresseurs attaquaient, personne ne se douterait que le corridor principal n’était qu’un cul-de-sac, voire un labyrinthe ou un piège fatal ! Le vrai passage était l’accès secondaire dissimulé dès l’entrée de la base secrète... très « Mutualiste » tout cela.
Il déboucha dans une grande antichambre de près de cent mètres de long : des dizaines et des dizaines de membres de l’organisation y étaient alignés, sertis dans leur tenue noire moulante et serrant le poing contre leur torse. Femmes, hommes, leurs durs regards se perdaient dans les hauteurs des parois, mais Stuffy jurerait qu’il s’agissait des personnes originales de ce fameux « cœur » mutualiste. Quelque chose dans leurs influx psychiques, un je ne sais quoi dans leur apparence plus tendue ou fatiguée... impossible de sonder plus loin les esprits, ce serait certainement repéré et mal interprété. Sans compter qu’ils étaient sans doute gavés de Boramol.
Ils levèrent le poing en criant :
« GLOIRE À LA MUTUALITÉ »
, alors que Stuffy franchissait la porte du fond dont les larges ventaux se refermèrent derrière lui.
« Bienvenue » résonna la voix déformée.
La nouvelle salle baignait dans une obscurité presque totale, on devinait la silhouette d’un imposant fauteuil nimbé d’une lueur violette. Stuffy s’étonnait qu’on ne lui ait pas retiré son révolver. Certes, la séquence des carreaux rougeoyants de l’entrée dissimulait sans doute un portique d’imagerie, pour vérifier qu’il ne portait rien d’autre que son émetteur et son arme, mais c’était bien insuffisant quand on connaissait la paranoïa maladive de l’organisation.
La voix poursuivit, alourdie par la déformation :
Les cachets font-ils déjà leur effet ? Cela devrait être rapide.
Je me sens un peu mieux, merci, répondit prudemment Stuffy ministère. Pourquoi tout ce théâtre ? On sait tous deux qui tu es et on vient de se croiser dehors.
Parce que c’est ainsi que cela fonctionne chez les Mutualistes... mon vieux ! Détends-toi, je ne te sens pas dans ton assiette : tu ne peux lire nos esprits, nous ne pouvons percer tes défenses... match nul, parlons !
Alors, comment va notre cher Chancelier ? Toujours en plein délire éroticoparanoïaque ?
Aux dernières nouvelles, il n’a pas condamné des centaines de milliers de gens à la mort, lui. Tu sais pertinemment qu’on t’arrêtera, maintenant ou plus tard. L’organisation des Mutualistes doit être dissoute immédiatement et ses membres doivent comparaitre devant les tribunaux.
Les tribunaux ? Et comment les paierez-vous ? Il n’y a plus d’argent, seuls les militaires ou les Forces mentales peuvent encore intervenir. Nous venons de créer les conditions pour que la vraie révolution commence et elle sera mutualiste ! Tu sais — toi aussi — que j’ai raison, car nous partageons le même gout de la justice !
Je voulais que tu puisses me retrouver ici. Je suppose que tu t’en doutes depuis le début, c’est pour cela que tu as préféré laisser tes troupes dehors.
Stuffy ministère ne répondit pas, il essayait de comprendre à qui il avait à faire. Ce Stuffy mutualiste usait d’un vocabulaire un peu plus châtié que le sien et d’une intonation hautaine. Malgré cela, c’était bel et bien un Stuffy-Quartmac identique qui lui parlait. Leurs références se croisaient, parfois même leurs objectifs ! La finance, l’économie monopolisée par quelques-uns, il ne les appréciait guère, mais ça ne méritait pourtant pas de tuer tout le monde ! Le Mental décida d’abréger, quelque chose de malsain flottait dans l’air.
Suis-moi, un orthoptère atterrira pour nous prendre et tu ordonneras à tes hommes de se rendre gentiment aux troupes mentales.
Hmmm, nous verrons. Dis-moi, as-tu reçu cette note de QuartMac qui prédisait une « transformation » de la psyché des chimères non matures ?
Oui. C’est ce qui fait que je voulais venir te chercher et pas te faire abattre, répondit sèchement Stuffy ministère. Son vis-à-vis avait visiblement choisi de jouer cartes sur table.
Hé, hé, hé... un peu de sérieux. Tu te demandes comment un frère a pu prendre une décision qui te semble aussi abominable, n’est-ce pas ? Tu considères que ce n’est pas possible, qu’une quelconque force extérieure m’a tordu l’esprit pour concevoir un tel projet ?
Stuffy mutualiste glissait doucement dans la véhémence, ce qui ne faisait que conforter le Stuffy ministère dans ses convictions. La silhouette poursuivit avec sa voix déformée :
« La réalité est que tu ignores l’étendue des implications. Mais nous en reparlerons plus tard. Dis-moi, que penses-tu de la multiplication des clonages ? As-tu décidé de transformer les Forces mentales en « Stuffy-land » avec des tas de doubles de toi, petits ou grands, gros ou maigres ? Ne t’es-tu pas demandé si tu n’étais pas l’agent idéal pour augmenter artificiellement les effectifs de ton organisation ? »
Bien sûr qu’il y avait réfléchi ! Une armée de lui-même ou plutôt des bataillons d’une sélection des meilleurs éléments des Forces mentales... mais Stuffy n’était pas mégalomane. Il ignorait ce que l’omnipotence pouvait engendrer, même sur un esprit équilibré, qu’il pensait équilibré, comme le sien. La folie du Stuffy mutualiste, comme les avertissements de QuartMac prouvaient qu’il avait eu raison de s’abstenir.
Tu sais parfaitement que non, répondit-il. Et d’ailleurs pourquoi discute-t-on, là ? Je t’ai demandé de me suivre et de donner à tes hommes l’ordre de se rendre aux Forces mentales !
QuartMac nous a menti ! rugit l’autre. Poféus t’a menti, tout le monde ment ici, tous ne font que se soumettre à la concupiscence et à la luxure ! Je veux un monde honnête, droit et surtout... sans surprise !
Soudain, de grands projecteurs éblouirent le Stuffy ministère, tandis que la porte coulissante derrière lui laissait entrer, autant que sa largeur le permettait, les Mutualistes présents dans l’antichambre.


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RedU T1 Ch26 Ep09

Red Universe Tome 1 Chapitre 26 Épisode 09 : " La guerre des Stuffies (1)"

L’équipe mentale progressait avec précautions vers la mine abandonnée. Plusieurs de ses collègues préconisaient le bombardement de l’endroit avec tout ce que comptaient les arsenaux spatiaux, quitte à raser les villages alentour et la banlieue de MaterOne, mais Stuffy avait repoussé l’idée. D’abord pour les victimes, mais également pour une raison personnelle : un Stuffy, un double de lui-même, était responsable du carnage à MaterOne-Centrum et il voulait comprendre pourquoi, malgré le risque.

C’était une semaine plus tôt, cinq Mutualistes, du nom de cette organisation prônant un changement majeur dans la société, sacrifiaient leur corps de chimères dans l’attentat le plus meurtrier de l’histoire. En une fraction de seconde, des charges d’antimatière avaient rayé de la carte tout le quartier des affaires de la capitale MaterOne-Centrum. Les dégâts structurels consécutifs au drame avaient presque doublé le nombre des victimes et la crise économique universelle qui en avait découlé perdurait. On pouvait tout juste produire un décompte définitif des administrations fermées et des faillites en tous genres. Mais quatre-vingt-sept-mille-six-cent-quarante-trois morts et plus de cent-mille blessés ne suffiraient pas à la folie qui avait atteint les Mutualistes, ils voudraient frapper plus fort et plus loin.
Dans la logique de changement de système, rien de mieux que de mettre à genoux le précédent et c’est exactement ce qui s’était passé. Si chez les Souriants ou les Nordistes la situation demeurait calme, du côté des Tropicaliens ou des Bruns cela virait à la violence et à l’anarchie. L’État ayant fait faillite, les budgets de la police, des milices ou de tous les services de secours étaient gelés et seule l’armée pouvait intervenir. Le carburant des forces de sécurité provenait uniquement de stocks réquisitionnés et cela ne durerait pas longtemps. On assistait à un redit des scènes de la Révolution Castiks quand des assauts étaient ordonnés dans plusieurs villes où des seigneurs de guerre tentaient d’accaparer le pouvoir...
Lorsque le Stuffy original s’était cloné quatre fois pour contrer le plan de Monsieur Heir, deux avaient pris la place du politicien dans ses rôles officieux : grand maitre des Triades souriantes et chef des Mutualistes.
Le ministre de la Sécurité Ralato Ouli se rendait actuellement auprès du premier, à la suite de quelques doutes des espions des Forces mentales, mais l’attentat de la rue du Mur changeait la donne.

Son équipe avait déjà neutralisé plusieurs dispositifs de surveillance qui truffaient les abords de l’entrée de la mine. La progression était difficile et...
... un des éclaireurs lui envoya l’image d’une vieille personne qui se dressait debout, seule, devant le passage obscur dans la paroi.
C’était le Stuffy.

Après la prise de pouvoir du chancelier Poféus, les dossiers et archives de l’organisation avaient été rapidement transférés aux bureaux du ministère, tenus à jour aussi souvent que possible. Il avait suffi de quelques semaines pour que le flot d’informations se tarisse et, stupidement, personne n’avait réagi à l’absence de données. Qui pouvait alors soupçonner un Stuffy, « un des quatre », d’une quelconque mauvaise intention ? Mais, depuis le drame, tout avait été relu et comparé et on n’avait pas mis longtemps pour capturer les premiers Mutualistes ayant participé à la préparation de l’attentat. Leurs interrogatoires par des Mentaux avaient permis de remonter la piste jusqu’ici.
L’organisation terroriste exploitait la technique du clonage à grande échelle de ses membres principaux, un millier d’après les documents reçus. Ils se transféraient régulièrement dans de nouveaux corps et poursuivaient leur quête en se sacrifiant aussi aisément qu’une version d’eux-mêmes prenait vie ailleurs. Ensuite gravitaient, autour de ce cœur, des sympathisants « normaux » répartis sur tout l’univers connu, parfois utilisés comme messagers, espions ou tout simplement comme chair à canon dévouée.

Sous le regard atterré des autres membres de son commando, le Stuffy du ministère se dressa au-dessus des buissons. Il laissa tomber au sol la majeure partie de son équipement, se contentant d’un révolver et de vêtements légers. Sac à dos, gilet pare-balle, casque... même son bonnet resta sur place. D’une pensée, il donna l’ordre de se replier et descendit, prudemment, vers l’entrée de la mine.
Ses hommes devaient littéralement paniquer à l’idée inquiétante que tous les Stuffy se soient ligués contre l’humanité. Cela les encouragera à se retirer au plus vite : si c’était une rencontre entre Stuffy qui était visiblement attendue côté mutualiste, on risquait de voir anéantir le reste du commando.
Le dernier pas qui le conduisit au terreplein fut de trop et le genou droit hurla : la décomposition de son corps se poursuivait et les douleurs se répandaient maintenant partout. Il ne put retenir une grimace impossible à dissimuler à l’autre petit vieux qui attentait : Stuffy mutualiste arborait un sourire narquois, sa peau était blanche comme une feuille de papier tandis que de profonds cernes bleus entouraient un regard inquiétant. Clairement, leur physionomie à tous deux différait.
Les quatre Stuffy s’étaient clonés dans les seuls corps alors à disposition : les chimères de remplacement non matures du professeur QuartMac. Résultat, quelques mois plus tard, des articulations en décrépitudes, des parties de l’organisme qui ne fonctionnaient plus et une vie de souffrance dans l’attente d’un nouveau corps. Stuffy mutualiste sortit doucement de sa poche une série de comprimés qu’il jeta aux pieds de l’arrivant, alors que des points rouges se promenaient sur sa tête : apparemment, les hommes du commando se refusaient à abandonner leur chef. Il prit la parole :
Dis-leur de s’en aller. Tu pourras leur envoyer un signal pour qu’ils viennent te chercher quand nous en aurons fini. Et ne t’inquiète pas, il ne leur arrivera rien.
Et çà, c’est quoi ? demanda Stuffy du ministère en ramassant la boite.
Un analgésique puissant doublé d’une formule de ma composition pour retarder les effets du vieillissement. Si tu les prends, la différence devrait se faire sentir très rapidement, dans le quart d’heure. C’est très efficace.

Stuffy ministère en fit rouler deux dans la paume de sa main. Était-ce un piège ? Quel serait l’intérêt de le tuer maintenant, l’autre en avait sans doute déjà eu l’occasion. Une drogue quelconque ? Il n’en savait guère plus que ce que Stuffy mutualiste connaissait déjà. Ce dernier reprit :
« Tu peux en avaler trois vu ton état. Moi, j’en ai besoin de deux par jour... pour l’instant. J’espère que de futurs corps sont en maturation de ton côté, les miens seront bientôt prêts.
Décide-toi, moi je rentre. La lumière du soleil m’éblouit et la présence de tes Mentaux me gêne. Rejoins-moi quand tu veux ! »
Stuffy ministère s’interrogea… puis il avala d’un trait trois comprimés en signalant à ses hommes de se replier une fois pour toutes, ordre mental à l’appui.
Enfin, sur une ultime hésitation, il disparut dans l’obscurité de l’entrée à la suite de l’autre Stuffy.


SOUTENEZ REDUNIVERSE ! - Prod: podshows, Réa: Raoulito, Relecture: JMJ, iGerard, Acteurs : Gvillaume: narration, Leto75: Stuffy Derush/montage: iGerard/`ceco, Musiques: VG, Ian, Cleptoporte

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FORCES MENTALES - Juillet 2018
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